La France des campagnes a totalement dévissé (par Marie Delarue) (mardi, 12 août 2014)

Publié par Guy Jovelin

Les caméras des télés – c’est-à-dire du parisianisme – sont toujours braquées sur les grandes métropoles. On parle constamment des banlieues : de Paris, de Lyon, de Marseille, de Lille… On cible les populations d’importation, davantage fauteuses de troubles, coupables d’inassimiliation. Alors, forcément, on regarde avec des yeux ronds l’institutrice qui, dans un petit village de 1.500 âmes au cœur du Berry, vous dit froidement : « Avant, je travaillais en ZEP dans la région parisienne. Aujourd’hui, je regrette de ne plus y être. »

Ce qu’elle dit, ce qu’elle nous dit à tous, c’est que la France enclavée, celle des campagnes qui ne sont pas irriguées par le tourisme et les nouveaux « rurbains », a totalement dévissé. Décrochage social, culturel, décrochage aussi sur le plan de la famille et de la santé, la France des profondeurs du pays, celle qui vivait autrefois de l’agriculture et des petits métiers, s’enfonce aujourd’hui dans le néant.

Les trente élèves de maternelle de cette maîtresse désabusée ont, comme tous les enfants, de jolies frimousses. Pas « d’extra-européens » parmi eux, pas d’ombre planante d’une immigration qui serait si commodément désignée mère de tous les maux. Pourtant, un seul enfant porte un prénom à consonance française : il s’appelle Raphaël. Tous les autres, sans exception, portent des prénoms de séries télé américaines : Sayan, Shaïyann, Kyle, Kyliane, Kyllian ou Kylian, Kellie, Kelya et même Junior… Même chose 20 kilomètres plus loin. Là, sur les 97 familles qui fréquentent l’école maternelle, on compte seulement un couple marié, et 7 enfants sont déjà placés en famille d’accueil.

Dans ces terres du Centre et néanmoins du bout du monde, on demande « ce que font » les parents. Question idiote : là-bas, il n’y a plus rien à faire. De fait, ils sont une infime minorité à avoir un travail, nous répond la dame. Le bricolage, alors, le jardinage ? Non. Les écolos des villes l’ignorent peut-être : ils n’ont pas d’alter ego dans les campagnes. Cultiver son potager, c’est bon sur les toits de Paris. Là-bas, c’est soda, frites-mayonnaise et Super U.

Dans ces populations qui vivent pour la très grande majorité des minima sociaux, l’obésité fait des ravages. Les mères sont souvent seules, promenant avec peine leur quintal entre des gamins que leur ont laissés des compagnons de passage. Des gosses parfois attrapés en sortie de boîte sur un capot de voiture et qu’on traîne toute sa vie comme des boulets. La contraception ? C’est quoi, ça ?

L’institutrice évoque ses ministres de tutelle, prononce en riant jaune la phrase magique : « égalité des chances ». Passe alors une femme, avec ses deux enfants qui se chamaillent. Le grand (3 ou 4 ans) asticote le bébé sumo qui se trémousse dans la poussette. « Arrête de faire chier, Truman ! » hurle la mère.

Ce pourrait être le titre d’un livre sur le déclin de la France…

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