Ancien élève de l’ENA, haut-fonctionnaire, Yvan Blot fut l’un des fondateurs du Club de l’Horloge, aux côtés d’Henry de Lesquen et de Jean-Yves Le Gallou. Il développa pendant plusieurs décennies des positions iconoclastes (immigration, démocratie directe …) et poursuivit ses travaux de philosophie politique à travers de nombreux ouvrages. Ses derniers titres publiés sont L’Europe colonisée et Nous les descendants d’Athéna (2 tomes, ici et là). Très fin connaisseur des réalités russes, il est consultant pour le groupe de médias La Voix de la Russie.
Propos recueillis par Romain Vincent
Au début des années 2000, Guillaume Faye évoquait également la colonisation du Vieux continent mais en désignant spécifiquement l’immigration extra-européenne comme source de soumission et non la colonisation économique, politique et culturelle venue d’outre-Atlantique. C’est ainsi que reprenant le principe de désignation de l’ennemi de Carl Schmitt, Guillaume Faye qualifiait l’islam d’« ennemi » et l’Amérique de simple « adversaire » avec qui l’Europe pourrait se réconcilier. Quel est votre sentiment à ce sujet ?
Je suis assez d’accord avec Guillaume Faye mais je préciserai « l’islam radical » pour désigner ce qu’on appelle un « ennemi ». Un islam modéré comme celui des Tatars en Russie n’est pas un ennemi et n’est pas désigné comme tel par Moscou. Quant aux Etats-Unis, je suis d’accord avec le terme d’adversaire. Cela peut changer si un jour l’Amérique redevient isolationniste au lieu d’être impérialiste. Beaucoup d’Américains dans le peuple le souhaitent.
Vous citez à plusieurs reprises la Russie comme contre modèle d’un Occident de plus en plus déclinant. Pouvez-vous nous en dire plus sur les transformations opérées dans ce pays ?
D’abord, la Russie a arrêté sa chute démographique. Depuis trois ans le taux de natalité s’est relevé et la population augmente à nouveau et approche 146 millions d’habitants. Beaucoup est fait pour les familles tant financièrement que symboliquement. A la naissance d’un enfant, une prime de 7000 euros (oui ! 7000 euros) est accordée. Par ailleurs, l’Etat organise chaque année une fête de l’amour, de la fidélité et du mariage avec remise de décorations aux couples méritants. C’est une fête laïque mais patronnée tout de même par les saints orthodoxe protecteurs du mariage, Piotr et Févronia.
La Russie a des performances économiques remarquables. Le chômage est deux fois plus faible que chez nous. Elle a de fortes réserves de devises. Elle a doublé son niveau de vie en quelques années. Ses impôts et charges font 35% du produit national contre 55% en France, ce qui favorise l’esprit d’entreprise. Son impôt sur le revenu est de 13% (flat tax) ce qui permet la promotion des cadres salariés sans fortune.
La Russie se distingue par une grande sagesse couplée à une grande fermeté face à l’activisme brouillon de l’OTAN.
L’armée se redresse et la Russie a retrouvé une troisième place pour l’importance des dépenses militaires dans le monde (après les USA et la Chine). Elle possède la plus grande force nucléaire par le nombre de missiles.
Culturellement et religieusement le pays se redresse. L’Eglise orthodoxe russe bâtit à tour de bras. A Paris va se construire une cathédrale orthodoxe avec un grand centre culturel et spirituel.
Quant au redressement politique, il est évident et la Russie compte autant que les USA, de plus en plus. Elle se distingue par une grande sagesse couplée à une grande fermeté face à l’activisme brouillon de l’OTAN.