On en fait beaucoup pour Théo… Pourquoi ne parle-t-on pas de Marin? (samedi, 18 février 2017)

Publié par Guy Jovelin le 18 février 2017

Benoît Rayski
Journaliste et essayiste

Publié le 17 février 2017 / Société

marin theo police hollande

Marin. Photo: DR.

Marin a vingt ans. Il est étudiant. Ou peut-être –et  hélas- il faudrait dire était… Il est hospitalisé à Lyon. On lui a fracassé le crâne. Après un long coma, il a repris conscience. Mais il a, en grande partie, perdu la mémoire. Ne sait pas pourquoi il est là. Et ne se souvient plus de ce qui lui est arrivé.

La tête défoncée à coups de béquilles

Voilà donc ce qui lui est arrivé. Il se trouvait dans une rue de Lyon, à proximité d’un couple qui s’embrassait sur la bouche. Il y a des pays où un tel comportement vaut le fouet ou un lynchage immédiat. Mais pas à Lyon, tout de même ? Eh bien si !

Un groupe d’individus, choqués et indignés par ce baiser, s’en est pris au couple. Insultes, injures … Sur les rares sites qui évoquent cette affaire, les individus en question sont qualifiés au choix de « jeunes » ou de « racailles ». Marin s’est interposé. Et c’est lui qui a tout pris. La tête défoncée à coups de béquilles. Dans certains quartiers de nos villes, la béquille est une arme.

La presse locale a évoqué ce drame. Mais pas avec suffisamment d’insistance pour que Gérard Collomb, le maire de Lyon, se rende au chevet de Marin. Il était sans doute trop occupé à soutenir Macron… Hollande non plus n’est pas venu. Pourtant, le courage est une vertu tellement rare de nos jours que la moindre des choses serait de le saluer. Le président de la République a trouvé le temps d’aller au chevet de Théo, blessé par un policier à Bobigny. Son Premier ministre a trouvé le temps de recevoir des soutiens de Théo. A-t-il reçu des membres du comité de soutien à Marin ?

Pour lui, il n’y a eu ni émeutes, ni voitures brûlées, ni flics caillassés. Pourquoi se dérangerait-on pour Marin ? Mais j’entends bien le reproche qui pourrait m’être fait à propos du parallèle entre Marin et Théo. Ce dernier a été victime d’un policier. Et ça changerait tout. Admettons.

La “fachosphère” a bon dos

Essayons alors une autre comparaison. Supposons que des allumés de Civitas, le fer de lance de la Manif pour tous, croisent un couple homo en train de s’embrasser et que, haineux, ils les agressent. Mais ça hurlerait de partout ! Hollande condamnerait, Taubira se roulerait par terre. Et la presse en ferait des gros titres. Supposons encore que quelques Identitaires aux cranes rasés se jettent sur des musulmans prosternés dans la rue à l’heure de la prière. Là ça hurlerait encore plus ! Et de partout, dans tous les médias, on annoncerait le retour des « heures-les-plus-sombres-de-notre-histoire ».

Alors oui, Marin mérite tout autant de compassion que les victimes supposées citées plus haut. Mais tel n’est pas le cas. Pourquoi ? Parce que, me souffle-t-on, le drame de cet étudiant lyonnais est relayé par la « fachosphère ». Ah la « fachosphère »… Elle s’intéresse de très près à l’identité des agresseurs de Marin. Et il faudrait taire cette identité, alors que c’est elle – et elle seule- qui, revêtue de la défroque du fanatisme, a fait que le spectacle d’un couple s’embrassant a été jugé blasphématoire et méritant châtiment ?

La « fachosphère » a bon dos. Mais pourquoi devrait-elle être seule à protester ? C’est à nous, à nous tous, de crier notre dégoût. A  nous tous, de gauche, de droite, du centre, de rien du tout. A nous tous, athées, chrétiens, musulmans. A nous tous, car, avec Marin, c’est nous qu’on essaye d’assassiner. Si nous nous taisons, qui criera pour nous quand on essaiera de nous fracasser le crâne ?

 

Source : causeur

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