Sortie de l’euro : gare à la démagogie ! (par Bernard Mitjavile) (lundi, 05 janvier 2015)

 

 Publié par Guy Jovelin

L’année passée n’a pas été trop brillante pour l’euro, qui a vu sa valeur baisser d’environ 12 % par rapport à son principal rival, le dollar, ce qui ne lui était pas arrivé depuis 2005.

Or, un grand argument des partisans d’un retrait de la zone euro est que pour redonner de la compétitivité à nos entreprises il faut quitter l’euro car il est surévalué, tiré vers le haut par l’économie allemande, et ceci sans qu’il soit nécessaire d’entreprendre de douloureuses réformes de structure (réforme de l’État, diminution du nombre de fonctionnaires, réforme des retraites et plus généralement diminution des prélèvements obligatoires).

La dépréciation de l’euro par rapport au dollar a un effet semblable pour les produits français hors de la zone Union européenne à un retour à un franc plus faible qui se dévaluerait de 15 ou 20 % par rapport à l’euro selon les dirigeants du FN (pour dire la vérité, on n’en sait rien et cela dépendrait largement du contexte politique).

Pour autant, le déficit de nos échanges commerciaux hors énergie s’est creusé en 2014, selon les chiffres publiés en novembre par les Douanes, passant de 9 à 14 milliards sur les neuf premiers mois de l’année. Cela devrait amener certains à s’interroger sur l’effet coup de fouet pour l’économie d’un retour au franc censé conduire à relancer les exportations et la production industrielle française.

En fait, la question du retrait ou non de l’euro est mal posée et, en l’occurrence, comme pour bien d’autres choses, l’important est dans les détails. La question n’est pas tellement de quitter ou non l’euro mais dans quelles conditions cela se ferait.

Une France à l’économie dynamique, tirée par ses exportations et dont la dette servirait à financer des investissements tournés vers l’avenir, n’aurait pas grand-chose à craindre économiquement en quittant la zone euro, indépendamment des difficultés politiques et institutionnelles.

Une France souffrant de déficits structurels, dont la dette sert à financer les dépenses de fonctionnement d’un État obèse plutôt que des investissements pour les futures générations, ne verrait pas ses problèmes résolus par un retour au franc mais ajouterait un facteur d’instabilité financière à sa situation.

Quand le FN s’oppose au recul des dates de départ en retraite, à la diminution du nombre de fonctionnaires (Marine Le Pen dans sa campagne de 2012), quand Florian Philippot soutient les grévistes de la SNCF à l’automne contre le « diktat » de Bruxelles, quand le FN promet des augmentations des aides aux agriculteurs et nous assure que tout se passera bien grâce à un État « intelligent et stratège » puisqu’il sera au pouvoir, il ne crée pas les conditions optimales pour quitter la zone euro.

On comprend que le FN cherche à « ratisser large », gagnant des voix de fonctionnaires, d’agriculteurs et autres catégories qui s’étaient tenues loin de lui, mais un langage de vérité serait mieux adapté à la situation actuelle.

La démagogie est peut-être une bonne chose pour gagner une élection mais, comme toutes les bonnes choses, il ne faut pas en abuser. Nous sommes nombreux à l’apprendre en ces lendemains de réveillon…

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