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mercredi, 10 septembre 2014

Ce que disent les développements de l’affaire Nemmouche… (par Gabrielle Cluzel)

Publié par Guy Jovelin

Les développements de l’affaire Mehdi Nemmouche tournent à la cacophonie sans nom. On apprend qu’animés des meilleures intentions, certains journaux avaient fait le choix de ne pas divulguer l’information selon laquelle Nemmouche – le tueur présumé du Musée juif de Bruxelles – aurait été un des geôliers des otages français de Syrie libérés en avril dernier. Il ne fallait pas nuire à l’enquête, ni à la sécurité des Occidentaux encore prisonniers.

Mais voilà : samedi, Le Monde a lâché le morceau. Les autres – Libération, Le Point — se retrouvent comme des douairières autour d’une tasse de thé, dépitées de voir un ragot explosif – qu’elles n’avaient pas divulgué par pure charité – révélé par une autre qu’elles, moins scrupuleuse. La vertu est bien mal récompensée.

La rombière trop bavarde qui n’a pas résisté à la tentation est conspuée, qualifiée d’« irresponsable ». Le Monde se défend mollement : on-ne-lui-avait-pas-dit-de-ne-pas-le-dire.

Quoi qu’il en soit, les autres qui, à présent, ne veulent plus être en reste – l’abnégation a ses limites — se bousculent pour crier bien haut qu’elles savaient aussi, attendu qu’elles avaient des journalistes de la rédaction parmi les otages, et qu’elles peuvent même rajouter des détails. Et des détails qui font froid dans le dos.

Nicolas Hénin, ex-otage en Syrie, révèle sur LePoint.fr que Nemmouche torturait les prisonniers. Que le reste du temps il chantait (« Douce France, cher pays de mon enfance… », par exemple), ou bien encore s’épanchait, se vantant de tuer d’une balle les vieilles femmes chiites, de violer les jeunes avant de les égorger, puis de couper la tête des bébés. Avec « plaisir ».

Libération, s’appuyant sur un P-V d’audition des otages qui n’aurait pas été versé à l’enquête du parquet, affirme par ailleurs que Nemmouche voulait « faire cinq fois Merah au 14 Juillet » (une information démentie par le ministère de l’Intérieur).

Légèreté coupable de la presse, dénoncent ceux qui lui reprochent d’avoir révélé ces informations hautement sensibles. Légèreté coupable de la presse, pourrait-on rajouter, dans l’analyse qu’elle fait de ces informations.

L’attentat du 14 Juillet, eu égard au profil « affabulateur » du personnage, serait, lit-on ici et là, peu crédible. Nemmouche serait aussi un pervers à l’ego surdimensionné, pour lequel le djihad ne serait que prétexte à assouvir ses pulsions psychopathes. Un « déséquilibré », donc, synonyme comme chacun sait « d’isolé ». Un déséquilibré grotesque, de surcroît, rêvant de l’émission « Faites entrer l’accusé » comme d’autres aspirent à participer au « Bonheur est dans le pré ».

Mais cet « affabulateur » a quand même tué (tout semble le confirmer) quatre personnes à Bruxelles. Pour de vrai, pas dans son imagination. Et ce « déséquilibré » un peu bouffon a été choisi pour surveiller les otages occidentaux en Syrie.

La presse doit prendre ses responsabilités. Peut-être pour notre sécurité et celle des otages n’aurait-elle dû rien dire de ce qu’elle savait sur Nemmouche. Mais puisqu’elle l’a fait, qu’elle en assume les conséquences : non, le risque d’attentat sur notre sol ne relève pas de l’affabulation. Non, les djihadistes ne sont pas des « déséquilibrés » isolés qu’il faudrait sous-estimer parce que leur soutènement idéologique serait d’une pauvreté risible.

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