Le mouvement d’indignation s’étend. Après les résistants des terrasses de café et les rebelles de la place de la République qui n’hésitent pas à rester éveillés jusqu’à point d’heure pour exprimer leur révolte, voilà qu’ici et là d’autres opérations spontanées voient le jour. Tout d’abord, en signe de solidarité avec les Parisiens de « La nuit debout », un groupuscule de travailleurs contraints de se lever tôt a décidé de démarrer une lutte baptisée « La nuit couché ».

Bientôt rejoint par des milliers de citoyens, le mouvement prend une ampleur qui surprend jusqu’aux initiateurs du projet. « Nous ne nous attendions pas à une telle mobilisation », a déclaré Marcel Dunlopillo, militant de la première heure. Force est de constater que le mot d’ordre « Au lit dès 21 h 30 » semble suivi à la lettre par de nombreux Français bien décidés à bousculer l’ordre établi. Face à l’étendue du mouvement, le gouvernement reste serein. Le recours aux forces de l’ordre pour faire évacuer dortoirs et chambres à coucher n’est, pour l’instant, pas envisagé par Bernard Cazeneuve.

Entre deux bâillements, le leader de ce rassemblement de trublions a précisé que quelques ex-manifestants bretons avaient troqué leurs bonnets rouges contre des bonnets de nuit et qu’ils ne répondaient pas de leurs réactions en cas de réveil brutal. Groupes de réflexion et autres commissions émaillent cette initiative. Un débat intitulé« Politique et couette républicaine » s’est tenu de 21 h 35 à 21 h 40 au rayon literie des « Galeries Lafayette », ouvertes exceptionnellement pour la circonstance. Dormir à gauche, à droite ou au centre ? La question divise les participants et fait l’objet de nombreuses discussions enflammées autour d’infusions fumantes.

Parallèlement à ces divers mouvements pacifiques, d’autres Français ont choisi des moyens de lutte plus démonstratifs. D’après des informations du ministère de l’Intérieur, il apparaît que des groupes de citoyens responsables ont décidé de prendre leurs véhicules pour aller occuper les autoroutes durant le week-end de la Pentecôte. Le vendredi 13 mai, une vaste mobilisation est attendue de la porte d’Orléans jusqu’au péage de Fleury-en-Bière. L’initiateur du projet, Jérôme Bouchon, estime que ce gigantesque blocage entre pleinement dans l’esprit du manifeste de « La nuit debout » : « Chaque jour, nous sommes des milliers à occuper l’espace public pour reprendre notre place dans la République. Et paf, dans les dents ! » a-t-il ajouté.

« Debout dans le RER », « Assis la nuit », « Accroupi dans les WC »,« Debout derrière un caddy », etc. Chaque jour voit naître un nouvel élan citoyen et divers regroupements de Français qui refusent de refuser. Ceux qui sont pour tout en étant contre ce qui est pourpeuvent désormais faire entendre leur voix, débattre, créer des commissions tout en faisant leurs commissions, discuter sous des éoliennes, brasser de l’air dans des conduits d’aération, bref, exprimer leur désaccord avec ce monde si injuste qu’ils contribuent tant à construire.

 

Source : http://www.bvoltaire.fr/