Pendant que le Conseil d’État se dépatouille pour trouver un statut juridique aux fameux lanceurs d’alerte, il en est un qu’il faudrait protéger avec cette nouvelle et splendide définition (« Un acteur civique qui signale, de bonne foi, librement et dans l’intérêt général, des manquements graves à la loi ou des risques graves menaçant des intérêts publics ou privés, dont il n’est pas l’auteur ») : le général Soubelet.

Le général de gendarmerie Soubelet a déjà été décrié en 2013 pour avoir averti l’Assemblée nationale de la catastrophique situation de la délinquance des mineurs : entre moyens inadaptés et récidives, rien n’aura été épargné à une commission d’enquête qui n’en menait pas large. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, aurait affirmé « vouloir la tête » du général en question. Chose promise, chose due : le général, pour avoir dit la vérité devant un parterre de personnes qui préfèrent se complaire dans le mensonge, a été muté au commandement de la gendarmerie d’outre-mer.

Mais le brave homme a récidivé récemment en publiant un livre, Tout ce qu’il ne faut pas dire. Insécurité, justice : un général de gendarmerie ose la vérité, afin de révéler au peuple tous les abus et petits secrets que le gouvernement souhaite garder dans l’ombre. Cette publication a provoqué beaucoup d’émoi en haut lieu et la hiérarchie a placé le général temporairement « hors cadre » (en attente, sans doute avec un rôle de chargé de mission), le temps qu’une commission statue sur son compte. Cette commission aura, d’ailleurs, pour but de décider si le général doit toujours bénéficier des faveurs de la hiérarchie pour son avancement ou non (devinez !)… L’obligation de réserve du militaire reste un principe flou, qui peut engloutir tous ceux qui ne pensent pas comme tout le monde ou ceux qui disent une vérité qui n’est pas bonne à exprimer.

Ainsi, le général Soubelet paye sa franchise et son honnêteté qui l’ont amené à dépasser son devoir de réserve de militaire : il avait le choix entre savoir et se taire ou faire savoir et être mis au ban.

Rappelons également que ce haut gradé militaire (quatre étoiles) est un héros malgré lui : pris entre deux feux lors de son audition parlementaire de 2013, il devait soit dire une vérité que personne n’avait envie d’entendre, soit l’édulcorer par une langue de bois que les parlementaires réclamaient pour pouvoir, une fois de plus, mentir au peuple. Comme quoi, même accomplir un devoir de citoyen correctement peut vous mettre en défaut par rapport au pouvoir qui l’exige et l’impose.

La grande muette, finalement, arrive encore à parler avec raison ! Le projet d’élimination des officiers qui donnent un avis différent ou un point de vue différent est toujours en place : la fameuse doctrine du« réfléchir, c’est désobéir » reste encore bien ancrée mais se fendille de plus en plus. Bon vent et bravo, Général, pour ces beaux actes de vérité, dans un monde qui ne la désire plus depuis bien longtemps !

 

Source : http://www.bvoltaire.fr/