Il fallait être zappeur professionnel et noctambule pour suivre les Jeux olympiques à la télé, mais surtout spécialiste ès chaque discipline sportive pour en comprendre le contenu et le règlement qui auraient pu faire l’objet de commentaires et d’incrustations techniques systématiques sur l’écran plutôt que les « oh, ah, allez ! » voire les larmes des divers commentateurs qui, tels des Stéphane Bern (heureusement, voire étonnamment absent), étaient omniprésents en paroles, auto-portraits, pensées (?) et omissions dans les 42 disciplines. France Télévisions pesait, à elle seule, 70 journalistes et 30 consultants.
Il y avait 395 sportifs français engagés dans 37 disciplines et, parmi eux, 37 athlètes militaires engagés dans 16 disciplines, soit, en arrondi et respectivement, 10 % et 50 % du total français. Les 10 % de militaires ont gagné 12 médailles sur 42, dont 3 en or, 7 en argent et 2 en bronze dans des disciplines d’un classicisme olympique autrement plus important que le badminton ou le ping-pong (en attendant le bilboquet), soit 35 % des médailles. Excusez du peu !
Ce sont eux que divers blogs ont baptisés à juste titre « l’armée des champions » et moi… « l’armée des ombres », puisque nos commentateurs les ont passés sous silence hors le « mon lieutenant-colonel » Vallette en or au concours complet. Pour info, les hommes disent « mon colonel » pour ce grade, mais au moins y avait-il pour une fois un « mon » qui n’est que l’apocope de « monsieur » et non un possessif. Son absence est le privilège des dames (et des appellations réglementaires dans la Marine nationale), mais il est vrai qu’au temps du « genre », les différences s’estompent. « C dans l’air » et Elkabbach adorent se gargariser de « général ». Ils doivent penser que ça leur donne de l’importance.
Bref, nos commentateurs auraient dû dire, par exemple, « le maréchal des logis » Florent Manaudou en argent en natation ou le « matelot » (ça se dit même pour une femme, à moins d’en faire un délice… culinaire) Hélène Defrance en bronze à la voile, ou le « quartier-maître » (il vaut mieux dire ainsi !) Charline Picon en or en planche à voile, ou le « brigadier-chef » Élodie Clouvel en argent en pentathlon moderne, ou enfin le « gendarme adjoint volontaire » Jean Quincampoix en argent au pistolet vitesse.
Leurs exploits valent ceux de nos « Sentinelle » qui arpentent nos lieux publics à raison d’une vingtaine de kilomètres par jour et sont logés dans des taudis avant de repartir, après quelques jours de repos dans leur famille devenue fantôme, quelque part dans la bande sahélo-saharienne, au Moyen-Orient ou ailleurs, car ils ont tous au moins deux choses en commun : la méconnaissance par le grand public de leur condition militaire et l’observance de vraies valeurs – professionnalisme de haut niveau, courage, abnégation, modestie, honneur et amour de la France.
On aurait, toutefois, souhaité que nos athlètes militaires passent de « l’ombre à la lumière » et que le chef des armées et son ministre de la Défense leur aient donné l’ordre de revêtir leur uniforme pour recevoir leur médaille et chanter « la Marseillaise » pour les médaillés d’or.
Espérons que nos 14 athlètes militaires sur les 126 des Jeux paralympiques ne subiront pas, malgré des valeurs d’abnégation et de courage encore plus exceptionnelles, la double peine de leurs blessures et de l’anonymat de leur condition militaire qui en a été la cause.
François Gex
Source : bvoltaire
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