Un feu vert sous conditions
Le gouvernement britannique est finalement revenu à la raison. Après avoir fait durer le suspense sur la réalisation du projet Hinkley Point, Theresa May, en poste depuis mi-juillet, a certes établi une liste de conditions, mais elle a surtout confirmé l’accord de principe donné auparavant par son prédécesseur, David Cameron. Le projet de centrale nucléaire, résultat d’un partenariat entre le gouvernement britannique et un consortium d’entreprises emmené par l’énergéticien français EDF, devrait donc se dérouler comme prévu et permettre l’installation, dans le sud-ouest de l’Angleterre, de deux réacteurs EPR d’une puissance cumulée de 1650 MW.
Selon l’accord signé au mois d’octobre 2015 par le groupe français et son homologue chinois – China General Nuclear Power Corporation (CGN) –, celui-ci participera à hauteur de 33,5 %, soit 6 milliards de livres sur les 18 milliards d’investissements que représenteront la construction des deux réacteurs (24,5 milliards d’euros). Le groupe EDF financera quant à lui 66,5 % du projet (12 milliards de livres) et devra rassurer le nouveau gouvernement, qui craignait ces derniers mois une prise de participation croissante de la compagnie chinoise.
La Première ministre a fixé à ce titre plusieurs conditions destinées à garantir la sécurité d’approvisionnement en électricité du pays et la mainmise de l’Etat sur des installations jugées stratégiques pour la sécurité nationale. La centrale d’Hinkley Point devra donc fournir 7 % du courant au Royaume-Uni à partir de 2025 et ne pourra être revendue, même en partie, sans l’aval du gouvernement. Le groupe EDF devra s’engager ici à conserver ses parts intactes durant toute la phase de construction des réacteurs, et ne pourra à terme jamais descendre en dessous des 51 % de participation. Le « nouveau cadre légal » prévoit aussi que le gouvernement puisse intervenir dans une éventuelle cession de la part d’EDF une fois la centrale en service.
Un choix économique et écologique
En validant officiellement ce projet, le Royaume-Uni a finalement choisi un camp. Celui de la raison, sans doute, que l’on opposera en Europe aux utopistes allemands, qui persistent encore à croire que les énergies renouvelables peuvent aujourd’hui à elles seules alimenter des sociétés de plus en plus énergivores. En choisissant l’énergie nucléaire pour l’avenir, le gouvernement britannique veut s’assurer d’une production énergétique à la fois stable, bon marché et décarbonée. Ce qui ne l’empêche pas d’accompagner le développement lent mais progressif des énergies renouvelables.
L’énergie nucléaire, n’en déplaise à certains, est en effet l’alternative énergétique la plus rationnelle à l’heure où l’urgence climatique nous oblige à verdir nos mix énergétiques et à substituer aux combustibles fossiles des sources d’énergie non émettrices de CO2. L’exemple de l’Allemagne, contrainte de rallumer ses vieilles centrales au charbon très polluantes suite au retrait précipité (pour ne pas dire irréfléchi) du nucléaire, suffit à nous en convaincre. Les énergies renouvelables, même développées à leur maximum, ne sont pas en capacité aujourd’hui de répondre à la demande énergétique nationale ou mondiale, et doivent donc être épaulées.
Les Britanniques l’ont bien compris et envisagent, via ce projet, de renouveler progressivement plus de 20 % de leur parc nucléaire. Les deux EPR constitueront la première construction de centrale nucléaire dans le pays depuis vingt ans. Ils permettront de répondre à 7 % des besoins en électricité de la Grande-Bretagne sur une période de 60 ans, d’alimenter plus de 6 millions de personnes en électricité et de créer 25 000 emplois directs et indirects. Pour la suite, d’autres projets sont déjà en discussion, et EDF pourrait entreprendre la construction de deux EPR à Sizewell et aider le groupe chinois CGN à obtenir la certification afin qu’il bâtisse son propre réacteur, le Hualong de 1 000 MW, à Bradwell dans l’est de l’Angleterre. Si l’on ajoute enfin les projets potentiels portés par d’autres compagnies comme l’Américain Westinghouse ou le Japonais Hitachi, l’énergie nucléaire semble avoir de beaux jours devant elle outre-Manche.
Source : 24heuresactu
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