mardi, 07 novembre 2017
INFORMATION FRANCE BLEU - Recrudescence de suicides chez les policiers
Publié par Guy Jovelin le 07 novembre 2017
Le suicide, un sujet qui reste tabou dans la police. © Maxppp - Alexandre Marchi / L'Est Républicain
Au moins dix policiers français se sont donnés la mort depuis la fin de l'été, dont sept en région Ile-de-France. Après une baisse sensible en 2016, le nombre de suicides dans la police repart à la hausse. Une série macabre qui interpelle sur le mal-être de la profession.
Un major à Béthune fin août. Un agent de la BAC de nuit de Paris début septembre. Ou le dernier en date, un brigadier membre des CRS dans l'Essonne. En tout, 39 fonctionnaires de police ont choisi de mettre fin à leurs jours depuis le 1er janvier. C'est déjà trois de plus que sur l'ensemble de l'année 2016, peut-être même cinq car deux autres cas font toujours l'objet d'une enquête. Ces suicides concernent tous les grades, tous les âges, mais essentiellement des hommes (seules deux ou trois policières se seraient suicidées en 2017). L'arme de service est utilisée dans environ 50% des passages à l'acte. Depuis la fin août, le phénomène s'est accéléré avec un pic de dix suicides en moins de deux mois et demi. L'Ile-de-France, qui concentre un tiers des effectifs de terrain (36.000 policiers), est la région la plus touchée.
Trois fois plus de suicides dans la police
La problématique n'est pas nouvelle : le taux de suicide dans la police est traditionnellement au moins trois fois plus important que dans la population générale. Mais la tendance était au recul depuis 2014. L'année dernière, on avait même enregistré le plus faible nombre de suicides de policiers depuis 2010. Un revirement alarmant pour les syndicats, même s'il est impossible d'en tirer des conclusions péremptoires. Ces actes désespérés ont presque toujours des causes personnelles, en premier lieu un divorce ou une séparation. Pour autant, on ne peut écarter le lien avec le milieu professionnel. Le métier est générateur de stress, d'éloignement familial, de désocialisation. Unité SGP Police Force Ouvrière, deuxième syndicat de policiers, milite depuis des années pour l'entrée en vigueur d'un rythme de travail respectant mieux la vie personnelle des fonctionnaires, explique Louis-Guy Dubois, délégué national aux conditions de travail. "Actuellement la plupart des policiers travaillent cinq week-ends sur six. Nous estimons qu'il faut un week-end de repos sur deux. Mais l'administration freine, car cela pose de gros soucis d'organisation dans une période où les policiers sont très sollicités."
Une manifestation de policiers le 16 septembre 2017 à Paris. © Maxppp - IP3 PRESS
Pour l'administration, la problématique est sensible mais surveillée de près depuis une vingtaine d'années. Chaque suicide de fonctionnaire donne lieu à un compte-rendu détaillé. Un bilan trimestriel est même présenté à chaque réunion du CHSCT (comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail). D'après ce tableau officiel que nous avons pu consulter, 1.133 policiers ont mis fin à leur jours depuis 25 ans. Si l'année 1996 avait été particulièrement noire avec 71 morts par suicide, les 55 cas de 2014 avaient ému l'opinion à l'époque. Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve avait présenté courant 2015 un plan de prévention des risques psycho-sociaux dans la police. Mais les attentats et l'état d'urgence qui a suivi ont compliqué sa mise en œuvre : le nombre d'heures supplémentaires a explosé (le cumul est passé de 16 à 20 millions selon l'UNSA Police), et les forces de l'ordre sont sous pression comme jamais. Peu d'agents le savent mais il existe un service de soutien psychologique opérationnel (SSPO), avec une ligne téléphonique ouverte 24h sur 24 (01 80 15 47 09). Dans les rangs, la souffrance se vit trop souvent en silence.
Par :
Nicolas Olivier France Bleu Paris
Source : francebleu
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