Se tenir, et tant qu’à faire se tenir bien. Se retenir surtout. Être maître de soi, de ses fureurs, de ses instincts. Par respect de soi-même et des autres, éviter les débordements et les cris. Voilà ce qu’on nous enseignait autrefois. Voilà, au temps des tweets et du triomphe de l’impulsion, ce qui n’existe plus.
Les faits du jour : sauvagerie à tous les étages. Des parents qui assassinent leur enfant et se livrent pendant dix jours à une mise en scène macabre, promenant une poupée dans son landau, chauffant des biberons pour la galerie avant d’inventer une fumeuse histoire d’enlèvement. Un adolescent qui se précipite en sang chez les voisins, dénonçant dans des propos incohérents un « crime de rôdeur » des plus improbables. Et puis une ex-première dame qui fait sous elle, qui chie sa haine en 300 pages comme l’autre lâche ses coups sur un nourrisson qui pleure, comme le frère exaspéré – ou jaloux lui aussi – a poignardé ses frère et sœur.
On peut juger le rapprochement osé. Il ne l’est pas. Tout cela relève du même mal : l’incapacité de tous ceux-là à penser plus loin que soi-même. Le père qui cogne le petit Loan, la mère qui s’en débarrasse comme on met les déchets au compost, l’adolescent de Moernach (Haut-Rhin) qui supprime ceux qui le gênent comme il le fait sur l’écran, Trierweiler qui confond l’État et la télé-réalité.
Interrogée par Yves Calvi sur RTL, la psychologue Sophie Marinopoulos assurait que l’assassinat du petit Loan témoigne de « la carence affective » des parents, soulignant qu’aujourd’hui « la famille est le lieu le plus violent de la société française ». La famille, ou le couple : je cogne, donc je suis.
Pour reprendre l’image prêtée au Président, la famille du petit Loan appartient aux « sans-dents ». Celles de madame Trierweiler sont immaculées et bien rangées. Le tribunal populaire accordera peut-être aux premiers le manque de discernement. Pas à la seconde.
Le petit Loan attend sa sépulture. Ses parents sont en prison, ses grands-parents disent qu’ils n’ont pas les moyens de payer les obsèques. La petite fille de Moernach est aujourd’hui sur la table d’autopsie. Son frère de 8 ans se bat contre la mort. Madame Trierweiler a eu un époux dont elle porte encore le nom et qui n’en demandait pas tant ; elle a trois fils, aujourd’hui de jeunes hommes qui doivent certainement, à l’heure qu’il est, affronter les quolibets. François Hollande a quatre enfants nés de son compagnonnage avec Ségolène Royal. Tous adultes, certes, mais qui doivent eux aussi subir la honte de cet étalage obscène d’une intimité qu’ils n’avaient pas à connaître.
Le commun dénominateur ? L’égoïsme, monstrueux. L’assouvissement immédiat des pulsions qui ne connaît rien d’autre que soi-même. L’ignorance de ce qui, au fil des siècles, a forgé la civilisation. La barbarie, en somme, chez les Groseille comme chez les Lequesnoy.