Des enfants en roue libre sur la toile
Voici une nouvelle qui n’étonnera pas les parents. Selon une étude, menée par l’institut de sondage OpinionWay pour le compte de l’association Ennocence, regarder des vidéos sur des sites de streaming ou de téléchargement illégaux figure parmi les principaux loisirs des enfants. Le sondage révèle ainsi que 55% des parents interrogés estiment que leurs enfants regardent des vidéos – films, séries ou matchs de sport – sur des sites illégaux. Un parent sur trois déclare même que ses enfants le font plusieurs fois par semaine.
Or se rendre sur des sites de live streaming ou de téléchargement illégaux ne donne pas seulement accès aux vidéos et évènements sportifs : les enfants y sont souvent les victimes de publicités agressives. Ainsi, 42% des parents estiment que leurs enfants ont été exposés à des images à caractère violent et 23% à des images à caractère pornographique. Un accès d’autant plus facilité par le manque de surveillance des parents qui, selon la même étude, sont une majorité (52%) à reconnaître ne pas surveiller la navigation de leur progéniture sur Internet.
Selon l’association Ennocence, fondée en 2015 afin de protéger les enfants contre les risques d’exposition à la pornographie en ligne, la situation nécessite l’intervention des pouvoirs publics. « A l’approche de l’élection présidentielle, nous souhaitons interpeller nos femmes et nos hommes politiques sur la nécessité de tout mettre en œuvre pour protéger nos enfants et jeunes adolescents de ces nouveaux risques », déclarent ainsi Gordon Choiseul et Brigitte Lahaie, respectivement président et ambassadrice de l’association. « Les parents se sentent démunis face à cet accès libre et sans contrôle réglementaire. Comme il est impensable d’afficher dans nos rues et librement pornographie et images violentes, il est grand temps de considérer le web comme l’Agora qu’elle est. Un espace public à encadrer pour protéger nos concitoyens, jeunes ou moins jeunes ».
Un appel en accord avec les préoccupations des parents, qui sont près de sept sur dix (66%) à considérer que les pouvoirs publics ne prennent pas de mesures assez efficaces pour protéger leurs enfants et huit sur dix (79%) à estimer que cette question n’est pas suffisamment abordée par la classe politique. Ainsi, « Ennocence milite pour la mise en place d’une véritable politique de prévention contre les dangers des sites financés notamment par des publicités déplacées », selon Gordon Choiseul. Si les enfants sont en première ligne, les dangers du live streaming illégal ne se limitent pas à la diffusion intempestive de publicités à caractère violent ou pornographique.
Les dangers du live streaming illégal
Selon l’OCDE, le streaming vidéo représenterait 91% du trafic Internet mondial. Or les sites illégaux proposant ce type de service seraient un repère de hackers, qui profitent de ce flux pour pirater, infecter les ordinateurs et voler les données personnelles de leurs utilisateurs – les pirates informatiques seraient à l’origine de la création de quelque 160 000 malwares par jour. Si les internautes qui fréquentent ce genre de sites ne risquent pas grand chose de la part des autorités de leur pays, il n’en est de même concernant leur matériel informatique et leur vie privée.
Les chiffres publiés, en 2014, par un rapport de l’AISP (Association of Internet Security Professionals) font froid dans le dos : 500 millions d’ordinateurs de par le monde seraient infectés, soit un sur trois ; 80% des sites de streaming hébergeraient des malwares sans le savoir ; 445 milliards de dollars auraient été perdus, en 2013, en raison de la criminalité sur Internet.
Et dans cette jungle online, les amateurs de streaming sportif sont les plus exposés : souvent pris par l’urgence d’une retransmission en direct, ils s’avèrent moins vigilants que les autres lorsqu’ils se connectent à des sites illégaux. Une précipitation qui peut coûter cher. Lors de la coupe du monde de football organisée au Brésil, 20 millions de personnes auraient visionné les matchs de manière illégale, s’exposant ainsi à l’appétit des hackers, mais également à la vigilance des autorités. Près de 4 000 interceptions de flux illicites auraient été opérées par les services spécialisés.
Surfer sur des sites illégaux n’est donc pas sans risque. Pour quelques euros économisés, les conséquences sur les enfants ou en termes de sécurité du foyer peuvent être longues à réparer.
Lucie Mallet
Source : 24heuresactu