Qui n’a pas un tout petit peu le coeur serré de voir les « boats people » sombrer en pleine méditerranée ? L’Italie fait ce qu’elle peut pour les sauver par le truchement de l’opération mare nostrum, nom latin de la mer précitée. Elle fait cela en plus dans l’indifférence de la communauté internationale. La France quant à elle récupère une fraction importante de cette marée humaine.
Effectivement l’élan spontanément humaniste en tout un chacun invite à ne pas abandonner un être humain, de porter assistance à personne en danger. Cependant il est permis de constater que le migrant s’est mis en danger tout seul, et que la responsabilité de son déracinement revient à ces états riches européens qui font tout ce qu’ils peuvent pour maintenir le mythe d’un eldorado. Autrefois, l’européen imaginait sous les tropiques une vie paisible, des cités prospères où l’or était pavement, des peuples ancestraux aux modes de vie sains. Relire pour s’en convaincre les écrits des humanistes du XVIIIème siècle sur le « bon sauvage ».
Désormais la réalité pousse à voir sous les tropiques une situation bien moins bucolique. Une surpopulation insoutenable, l’extrême misère pour presque tous, l’extrême richesse pour quelques uns. Alors bien sûr certains font leurs valises et viennent dans le pays de l’ancien maître honni pendant la décolonisation. Maintenant les cartes sont rebattues, l’occidental n’est plus l’exploiteur d’autrefois. Les nouveaux maîtres ont montrés qu’ils étaient pires.
Ils s’entassent sur des bateaux. Les passeurs sont des importateurs de viande humaine. Ils exigent un prix exorbitant en échange d’une promesse insatisfaisante. Soit les migrants vivent l’enfer du naufrage en mer, soit ils vivent l’enfer du naufrage à terre. La course pour régulariser sa situation, la vie de dépendance totale à l’état d’adoption. Certes nombre d’entre eux, plus débrouillards, vivoteront correctement ; tandis que quelques élus réussiront et feront honneur à leur nouvelle patrie. La plupart sont condamnés à porter la croix de la misère dans un pays qui n’est pas le leur. Ils se regroupent en communautés pour conserver le souvenir d’un temps maintenant perdu.
Je dis que les plus coupables dans cette malheureuse histoire ne sont pas les migrants. Les coupables sont les gouvernements qui par leur lâcheté déracinent des hommes. Par ce biais, ils les condamnent à accepter le premier boulot, pour le plus grand bonheur de patrons sans scrupules (proxénètes, ateliers clandestins, distributeurs de drogue et autres nouveaux esclavagistes) ou à vivre de mendicité (et de sa nouvelle forme plus discrète : l’assistanat). Je dis que les passeurs sont des bouchers pour lesquels aucune sanction pénale n’est aujourd’hui assez forte pour leur faire rendre les trente deniers perçus. L’immigration zéro n’est pas une sentence antihumaniste. Elle est l’expression du simple respect de ces hommes et femmes qui quittent le monde connu d’eux pour un bond dans l’univers occidental. Elle est aussi le respect des pays de départ, confrontés à une hémorragie de forces vives. Le perdant-perdant en somme. Ces forces ne seront pas employées dans le pays d’origine et ne trouveront pas leur place dans la terre promise.
L’immigration zéro n’est pas la fin de l’immigration. Les hommes ont toujours voyagé, exploré, déménagé. Mais le flux à sens unique que l’on constate bouleverse gravement un équilibre précaire. Il détruit toute action et engendre le ressentiment, à juste titre des immigrants trompés comme des autochtones envahis. Alors pour plus d’humanité dans un monde à la dérive, disons non aux frontières passoires, aux politiques d’assistanat, à la pompe aspirante immigrationniste. Et merde aux exploiteurs-importateurs, aux biens pensants (sans pensée), aux allophiles convaincus (en grec : qui aime l’autre).
Marc-Antoine HENNET