Les portables font désormais la loi dans la prison de Seysses. Bien qu’interdits, les mobiles permettent aux caïds de continuer à gérer leurs affaires illégales et d’exercer un moyen de pression sur d’éventuels rivaux ou témoins.
La prison de Seysses, au sud de Toulouse, fait de nouveau parler d’elle. Malgré le scandale de la vidéo diffusée sur YouTube en février 2017, où l’on voyait certains de ses détenus exhiber fièrement de la marijuana dans leurs cellules, aucune mesure ne semble avoir été prise pour contrer le va-et-vient incessant des téléphones portables en son sein.
1000. C’est le nombre de portables qui sont ainsi saisis chaque année à la maison d’arrêt de Seysses. Des « projeteurs » comme les ont surnommés les gardiens, n’ont qu’à longer la Saudrune et traverser les courts de tennis jouxtant la prison pour jeter les précieux « colis » par dessus son enceinte. La famille ou les proches d’un détenu peuvent ainsi, de jour comme de nuit, lui faire passer de la drogue, de l’alcool, des armes blanches et des portables en seulement quelques dizaines de minutes. A l’intérieur, le manège est maintenant bien rodé : un détenu est choisi pour faire la mule, c’est à dire récupérer discrètement les diverses denrées pendant la promenade et les remettre à celui qui avait passé sa commande via… son téléphone portable personnel. Un portable saisi est ainsi systématiquement et aussitôt remplacé. Nicolas François, secrétaire local du syndicat pénitentiaire des surveillants à Seysses, déplore la situation : « Celui qui purge une peine, s’il a un business dehors, continue de l’exercer avec son téléphone« .
Les portables créent d’une autre part une véritable hiérarchisation carcérale, celui qui en détient devenant un caïd pouvant directement menacer la famille ou les amis d’un co-détenu avec qui il a eu un différent. Vecteur d’une violence toujours plus forte, le portable est au cœur de nombreuses rixes à l’intérieur de la prison : « Au cours du grand week-end du 15 août, un détenu s’est fait casser la machoire parceque son frère doit des comptes à des gars à l’extérieur. Pour lui mettre la pression ils ont fait faire le travail depuis l’intérieur« , raconte le surveillant à La Dépêche. Les tensions qui existaient déjà à cause du trafic de shit se voient de la même manière multipliées par dix : en mars, deux surveillants ont été attaqués. La raison ? Ils venaient tout simplement de faire leur travail en interceptant un portable…
Les gardiens sont les premiers à regretter une telle situation, eux qui ne cessent de réclamer une augmentation de leurs effectifs. En ce moment, des étages de 110 détenus peuvent être surveillés seulement par une seule personne ! Dans une lettre ouverte, datant de cet été et adressée à la garde des Sceaux Nicole Belloubet, les gardiens font un rapport alarmant quant à leur situation actuelle et soulignent une surpopulation toujours plus inquiétante.
Rappelons que la maison d’arrêt de Seysses compte aujourd’hui pas moins de 1 120 détenus pour seulement 670 places.
L. Fandor
Source :infos-toulouse