La privatisation des autoroutes, datant de l’année 2005, a depuis constitué un manque à gagner d’environ 10 milliards d’euros pour l’État (un cas qui n’est pas sans rappeler la vente de l’aéroport de Toulouse-Blagnac à un consortium sino-canadien, mais passons). Il faut savoir, comme le rappelait à juste titre Ségolène Royal, que sur 100 euros de péage payés par l’usager, 22 euros sont un bénéfice net pour les sociétés d’autoroute, qui ont engrangé 15 milliards de dividendes depuis la privatisation. Un cruel manque à gagner pour l’État français qui aurait bien besoin d’une telle manne pour combler une dette qui ne cesse de se creuser. Mais ça, peut-être fallait-il y penser avant, car les folles privatisations qui ont commencé sous le socialiste Jospin n’ont rien rapporté aux usagers ou à la France, mais tout aux entreprises privées et aux financiers.
Gilles de Robien, ministre des Transports jusqu’en juin 2005, avait bien tenté de s’opposer à la privatisation des autoroutes, mais le lobby des constructeurs a eu raison de lui et il fut débarqué. En décembre 2005, sous le gouvernement Villepin, Thierry Breton à Bercy et Dominique Perben au ministère des Transports ont fini par valider la transaction et ont signé un contrat indigne, voire illégitime. C’est à se demander si les membres du gouvernement Villepin n’ont pas été soudoyés pour signer un contrat aussi défavorable… Les temps changent, mais les mœurs n’évoluent pas au sommet de la gestion étatique UMPS : trahisons et reniements sont toujours au menu.
En effet, même les rapporteurs de l’Autorité de la concurrence ont eu du mal à croire ce qui se trouve dans les contrats de concession passés à l’époque. Les concessionnaires étaient protégés contre toute modification ou création d’impôts nouveaux (contrairement aux Français de tous les jours, de plus en plus écrasés par l’impôt) ; jusqu’à vendredi, jour au cours duquel les députés ont voté la fin de cet avantage fiscal et de l’absence de plafond pour déduire les charges financières.
Dans ce contexte juridique qui soumet totalement notre État aux groupes privés, et est particulièrement désavantageux pour les Français, l’appel des 152 députés socialistes réclamant le rachat des concessions d’autoroutes sonne creux. Jamais le gouvernement n’aura le courage d’avaliser une telle mesure, jamais il n’aura la force de s’opposer à Vinci et aux autres qui pourront continuer à tondre les usagers et un État trop faible depuis déjà plusieurs années. Et quelle logique y aurait-il à vendre l’aéroport de Toulouse-Blagnac tout en dépensant entre 15 et 20 milliards d’euros pour racheter le réseau autoroutier ? Cela n’a ni queue ni tête.
Le gouvernement privilégie d’ailleurs une renégociation des contrats avec prolongation de leurs durées, en échange de 3 milliards d’euros d’investissements. Nul doute, de toute façon, que Manuel Valls et Emmanuel Macron eussent aussi privatisé les autoroutes s’ils avaient été aux affaires en 2005. Sortons ces incapables.
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